800 millions de personnes n'ont pas accès à une eau potable dans le monde. L'Afrique subsaharienne est la zone la plus sinistrée, 40% de sa population peine à trouver le précieux liquide.
La collecte des eaux de pluie lancée il y a deux ans dans le nord du Burundi facilite la vie des habitants, confrontés à une pénurie d’eau
croissante. Le reboisement et la construction d’impluviums [réserves d’eau] sont les moyens mis en œuvre par le programme Eau potable pour tous.
“Nous avons l’eau qui nous convient pour satisfaire tous nos besoins sans faire des kilomètres de
marche”, s’exclame, soulagée, Rosalie Nyambere, 27 ans, mère de cinq enfants, de la commune de Bugabira (province de Kirundo), dans le nord-est du Burundi, bénéficiaire du
programme Eau potable pour tous. Celui-ci met en place des systèmes pour recueillir l’eau pour les besoins domestiques aussi bien que pour l’agriculture. La faible pluviométrie (800 mm/an)
et la sécheresse qui s’étend sur plusieurs mois caractérisent cette région. “Il n’y a donc pas de cours ni de points d’eau potable : la population parcourait plus de
15 kilomètres à la recherche d’un point d’eau”, indique Marcien Nzoya, agent de développement communal. “Depuis notre enfance, l’eau nous a toujours coûté cher, en temps
et en énergie”, complète Marthe Kankindi, 56 ans.
Le programme a été monté par des natifs de cette province qui travaillent dans d’autres régions, avec l’appui de l’Etat, sur les
fonds de la coopération allemande. Ils ont décroché 45 000 euros pour mettre au point des systèmes de collecte des eaux de pluie pendant la saison pluviale pour s’en servir pendant la
saison sèche.
Selon le chef de mission de Welthungerhilfe, partenaire du programme,“collecter les eaux ne veut pas dire seulement capter l’eau
de pluie, mais également encourager une plus grande infiltration de l’eau et donc la conserver dans le sol en empêchant le ruissellement et l’érosion. C’est pourquoi le projet envisage le
reboisement des espaces dénudés.” Peu à peu, les habitants apprennent ainsi à entretenir et à protéger les boisements, indique Kirima, du service météo.
On construit aussi des impluviums dont la forme est celle d’une citerne en plastique surmontée d’un tuyau qui y canalise l’eau venue
du toit des maisons, tandis qu’en bas un robinet permet de tirer l’eau que l’on veut utiliser, explique Marimbu Alphonse, formé à les construire. Pour lui c’est le moyen le plus adapté, car il
permet d’éviter de transporter l’eau depuis une source éloignée, et sa qualité est généralement supérieure à celle de certains ruisseaux ou marigots. Faciles à installer, surtout que la
population apporte pierres et sable pour les mettre en place, les impluviums domestiques coûtent 150 000 francs burundais (100 euros environ) et stockent de 500 à
1 000 litres selon les initiateurs, alors que ceux adaptés pour des collectivités, villages ou écoles peuvent contenir 1 000 à 10 000 litres. Selon Marthe
Muhimbare, une habitante de la région, ces impluviums garantissent l’indépendance de l’approvisionnement en eau, puisque les ménages qui les utilisent ne sont pas tributaires des ressources de
la communauté ou des aménagements collectifs, que ce soit pour arroser les cultures ou pour un usage quotidien. Pour cette femme de 60 ans, disposer de ces eaux de pluie permet de
récupérer du temps, de l’argent, et surtout de l’énergie. “Ceux dont les maisons sont couvertes par des tôles sont en bonne position pour récupérer beaucoup d’eau. Ceux dont les
toitures sont en paille réclament des tôles !” constate Béatrice Inankuyo, 70 ans. Des préjugés entravent cependant le développement de ce programme : certains croient
que la consommation de l’eau de pluie conduit à la stérilité, d’autres que les jeunes filles qui en boivent ne peuvent pas avoir de mari. Pour la consommation directe, la direction provinciale
de la santé propose des comprimés pour assainir cette eau qui reste longtemps dans les citernes.
Depuis l’an 2000, des familles ont déserté la région à cause de la sécheresse et des difficultés d’approvisionnement en eau,
préférant aller dans les régions où la vie est plus facile. Actuellement, grâce à ce programme, des gens commencent à revenir progressivement.
de Gabby Bugaga, pour Courrier International.