DECOUVERTE
Depuis plusieurs décennies, à partir notamment de cellules souches de la moelle osseuse, des équipes du monde entier s'efforcent
d'obtenir des spermatozoïdes fonctionnels. A l'université de Yokohama, selon un résultat publié par la revue « Nature » le 23 mars, l'équipe du professeur Takehiko Ogawa semble la première à avoir
relevé le défi, du moins sur la souris.
Les chercheurs japonais sont partis de fragments de tissus provenant de testicules immatures de souriceaux, qu'ils ont réussi à cultiver dans un
liquide dit «Knock Out Sérum Replacement», habituellement utilisé dans les cultures de cellules souches
embryonnaires.
Ceci a permis de franchir le stade de la méiose - le stade de la division cellulaire
au cours duquel les chromosomes homologues échangent leur ADN. Auparavant, les spécialistes utilisaient le sérum de veau foetal, un milieu de culture cellulaire très classique, et
ne réussissaient justement pas à franchir ce cap de la méiose. Le changement de support
nutritif s'est donc avéré décisif, «ainsi que d'innombrables essais pour ajuster au
mieux
la "recette", sans se laisser décourager par les échecs », commente Erwin Goldberg, de
l'université de Chicago.
Les tissus spermatiques de souriceau ont mûri pendant un peu plus de deux mois, et on
a pu ensuite récupérer dans le mélange, parmi de nombreux spermatozoïdes « ratés »,
une
proportion non négligeable d'authentiques gamètes masculins fonctionnels, pourvus
de
flagelles. Avec lesquels des ovocytes de souris ont pu être fécondés. Après
implantation
dans des souris, le professeur Ogawa a obtenu la naissance d'une douzaine de
souriceaux,
dont on a pu ensuite vérifier la fertilité. On a vérifié aussi que le sperme artificiel
supportait sans dommage 25 jours de congélation.
D'où la conclusion que «le procédé pourrait être appliqué aux jeunes garçons atteints
d'un cancer, que leur traitement risque de rendre stériles » : il suffirait, à partir
d'un prélèvement sur leurs tissus testiculaires immatures, de leur préparer une réserve de
spermatozoïdes.
Fabien Gruhier. Le Nouvel Observateur